Les seniors en entreprise, vraiment indispensables?

C’est le postulat d’un ouvrage collectif qui entend déconstruire, chiffres et études à l’appui, les préjugés à l’encontre des travailleurs seniors.

L’ouvrage collectif a été verni lors du récent Salon RH à Lausanne. (DR)

Derrière le titre sous forme d’injonction (Les seniors en entreprise: plus que jamais indispensables!) se cache un véritable plaidoyer pour une meilleure intégration des travailleurs de plus de 55 ans. Car oui, la catégorie des «seniors» englobe non seulement les baby-boomers, mais aussi la génération X, née entre 1965 et 1980. Autrement dit, nul besoin d’avoir atteint l’âge officiel de la retraite pour être perçu comme une force de travail vieillissante, à laquelle on associe trop souvent et à tort des tares comme la santé fragile, la motivation en berne ou encore la maîtrise approximative, voire inexistante, des nouvelles technologies.

Sous l’impulsion du programme AvantAge, rattaché à Pro Senectute et dirigé par Costantino Serafini, un «livre blanc» vient de paraître aux Editions Favre. Son objectif: déconstruire ces préjugés et mettre en lumière la valeur d’une main-d’œuvre expérimentée et trop peu courtisée. En une dizaine de chapitres rédigés par autant de contributeurs, précédés d’une préface de l’un des travailleurs seniors les plus médiatiques de Suisse (le conseiller fédéral Guy Parmelin), et complétés par quatre portraits, la thématique est explorée sous différents angles. Rappelant que les seniors sont issus d’un monde où la fidélité à un employeur et à une profession allait de soi, Costantino Serafini souligne que cette maind’œuvre ne peut plus être ignorée, compte tenu du vieillissement de la population et du départ prochain à la retraite des baby-boomers à l’horizon 2030. Il évoque plus loin les résultats d’une enquête réalisée en 2024 par MIS Trend auprès de 433 entreprises romandes, qui confirme la difficulté des seniors à décrocher un poste. Pas moins de deux entreprises sur dix n’emploient aucun collaborateur de plus de 55 ans, tandis que trois sur dix seulement comptent au moins une personne de plus de 60 ans. Plus préoccupant encore: 22 % des entreprises interrogées excluent l’idée d’engager une personne âgée de 60 à 65 ans, une proportion qui monte à 52 % pour les plus de 65 ans.


«Le senior peut apporter beaucoup à l’entreprise»

Constantino Serafini, Avantage


L’heure n’est toutefois pas au pessimisme. Le savoir-faire et l’expertise sont les atouts majeurs des seniors, et les représentants de la génération X ont en plus l’avantage d’avoir traversé et intégré les grandes transformations numériques, de l’essor de l’informatique à l’arrivée d’Internet, alors qu’ils étaient déjà en poste. Une expérience qui en fait des profils particulièrement résilients. Par ailleurs, Marco Taddei, responsable romand de l’Union patronale suisse, rappelle dans sa contribution que la question des seniors figure depuis 2006 dans une stratégie nationale qui fait de la neutralité de l’âge dans les processus de recrutement une priorité, entre autres.

Quid de la réalité du terrain? Deux constats s’imposent au fil de l’ouvrage: d’une part, il est rare de se réinventer professionnellement à l’âge de la retraite; d’autre part, les entreprises privilégient la prolongation des contrats existants plutôt que le recrutement de nouveaux talents seniors. D’où l’importance d’un dialogue régulier entre les équipes et le département des RH, à qui il incombe de comprendre les attentes de leurs collaborateurs expérimentés et d’adapter, au besoin, les conditions de travail.

(Patrick Claudet)


Davantage d’informations:

programme-avantage.cheditionsfavre.com


En librairie

A l’heure où la main-d’œuvre qualifiée manque, faut-il se priver de collaborateurs de 55 ans ou plus? Placé sous la direction de Costantino Serafini, ce «livre blanc» nourrit le débat grâce à une dizaine de contributions et des portraits de seniors ayant choisi de continuer à travailler.

Editions Favre 192 pages ISBN 978-2-8289-2286-3