Treize étoiles? Ce sont bien sûr celles du drapeau valaisan. Mais c’est aussi la démarche initiée cet automne pour «tirer vers le haut» les vins valaisans.
Tout le gratin du vignoble valaisan était convoqué, fin septembre, chez et par Marie-Thérèse Chappaz, icône du vin suisse, mais surtout présidente de l’Union des vignerons-encaveurs valaisans, en compagnie de l’œnologue cantonale Corinne Clavien, du responsable politique du département de l’économie (et de la vitiviniculture) Christophe Darbellay, du président de l’Interprofession de la vigne et du vin du Valais Benoît Aymon, et un directeur de la Marque Valais/Wallis, Raphaël Favre, vu que les vins répondant au cahier des charges auront droit à la reconnaissance par cette instance.
L’ambition est à la hauteur de la complexité du processus. Les vignerons, professionnels ou non, petits ou grands, sont invités à inscrire des parcelles dédiées à la démarche. Les étapes sont énumérées sous forme d’étoiles annuelles. Les trois premières sont fixées pour que, dans ce laps de temps les raisins soient produits aux normes biologiques. C’est donc le retour du «bio parcellaire», admis au début du bio, puis banni des directives fédérales. Suppression des engrais minéraux de synthèse, traitements sans produits de synthèse, absence d’herbicides sur la parcelle seront les trois premiers stades à atteindre.
Le label, sous le sceau Marque Valais, ne sera pas «une segmentation qualitative pour les vins», mais un «œillet à la boutonnière», la fierté du vigneron, pour des vins à partir de vignes inscrites dans les secteurs communaux d’encépagement, avec des variétés autochtones ou traditionnelles, vinifiées pures, sans coupage, et mis en bouteilles en Valais.
L’engagement sera évolutif sur 13 ans: la 4e étoile vise à encourager la biodiversité dans la vigne, la 5e, l’utilisation raisonnée de l’eau, la 6e, l’œnologie et la mise en valeur du terroir (plus que du cépage), en renonçant à la chaptalisation, aux copeaux, au moût concentré rectifié (déjà interdits par l’AOC). Les trois paliers suivants, sociaux, visent à mieux former le personnel viticole. Deux crans supplémentaires pour la reconstitution des murs en pierres sèches, sans mortier, et la favorisation de la diversité génétique des cépages (sélection massale ou sélection Valais). Enfin, deux étoiles pour la communication et la transparence, vers le «développement durable».
A chaque étape, il y aura des contrôles, notamment des analyses sur les résidus contenus dans les vins, dès la première année. Et chaque année, les vins, mis sur le marché seront dégustés avant mise en bouteille par une commission de validation. A la clé, un prix supérieur à la bouteille, fixé à titre indicatif.
La démarche 13 étoiles se superpose à d’autres, par exemple au Grand Cru, un règlement adopté par plusieurs communes valaisannes. Le Grand Cru se limite à quatre cépages choisis, avec contrôle des vignes (sans critères bio) et dégustation probatoire. Mais Fully a suspendu son adhésion depuis deux ans, car les encaveurs refusent de loger leurs vins dans la bouteille dite «cantonale», de forme bourguignonne, utilisée naguère à Vétroz, alors qu’ils ont, eux, leur propre bouteille bordelaise à bague. Le diable, souvent, se cache dans des détails.
L’autre problème, c’est la difficulté pour le consommateur — et même le journaliste — de comprendre le distinguo des labels: AOC et Grands Crus de base (différents dans chaque canton); label Vinatura de Vitiswiss, peu courant, mais proche du 13 étoiles; et les trois bios, fédéral, bourgeon et demeter (en biodynamie, le plus sévère). Sans compter les concours cantonaux, nationaux, thématiques et internationaux qui eux, ne se préoccupent en rien de l’amont de la dégustation, mais balisent les rayons des supermarchés, avec leurs médailles d’or et d’argent. Les premiers vins 13 étoiles sont attendus au printemps 2020, après les vendanges 2019, pour autant qu’ils respectent les exigences de la première étoile.
(Pierre Thomas)