Après avoir confié les clés de son adresse doublement étoilée de Cossonay à son équipe, le chef officie désormais comme consultant. Et publie un nouveau livre.
En 2020, il s’éclipsait sur la pointe des pieds, une pirouette comme on lui en a toujours connu. On savait que son départ du Cerf, à Cossonay – confié à François Gauthier et Romain Dercile, ses équipiers de longue date pour une formule plus minimaliste – n’avait rien de définitif. Revoici en effet notre Carlo Crisci avec de nouvelles missions de consultant, de nouveaux projets autour de l’huile d’olive et de la fondue, un peu plus de temps à consacrer à ses passions de toujours, de la cueillette au ski. Et ce livre en forme d’hommage aux légumes. Non pas que Carlo se soit converti au végétarisme mais il préfère désormais, comme tant de flexitariens épanouis, limiter sa consommation de viande et de poisson à de plus rares occasions et des produits d’exception.
Un livre de recettes légumières donc, une septantaine sur quelque 150 pages, qui fait en quelque sorte la synthèse souriante des origines italo-suisses, de la formation française eu parcours essentiellement autodidacte, des influences marquantes et de la patte unique du chef doublement étoilé. Pas de fondue cette fois, quoique. Les croquettes au vacherin fribourgeois ou la raviole du même fromage au poireau n’en sont pas très loin. Beaucoup de recettes formidablement alléchantes et qui semblent avoir le mérite, pour une fois, de la simplicité. C’est ainsi un retour aux origines et à l’héritage familial du chef qu’évoque ce beau livre. Le répertoire végétal des régions italiennes est un des plus riches, diversifié et coloré qui soient. Ajoutez à cela l’huile d’olive des arbres centenaires du village de Roscigno, dans la province de Salerne, toujours exploitée par la famille Crisci et bien présente sur les tables du Cerf depuis toujours. Et vous obtiendrez une cuisine gaie, saine, vivante et légère.
Et voici aussi quelques herbes et champignons sauvages – Carlo Crisci a désormais plus de temps pour s’adonner à la cueillette, une de ses marottes depuis les années Couplan. On goûtera ainsi le parfum vanillé du mélilot ajouté à un gratin navet-pomme de terre, la salade d’éperviers ou celle de haricots verts agrémentée de chanterelles et de noisettes, voire les cornes d’abondance et salsifis en papillotes. On aime aussi la malice du steak végétal – loin des versions industrielles ultra transformées – à base de pois chiches et borlottis, de shiitakés et d’herbettes fraîches. Celle de la tatin d’endives ou des linguine au chocolat et haricots noirs pimentés. Envoûtant et nomade.
(Véronique Zbinden)