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«Il faut enseigner le gôut dès l’enfance»

A la tête du Salon suisse des Goûts et Terroirs depuis 14 ans, Marie-Noëlle Pasquier prépare la 25e édition d’un rendez-vous incontournable.

Marie-Noëlle Pasquier accueillera les visiteurs du 29 octobre au 2 novembre pour. la 25e édition du Salon suisse des Goûts et Terroirs. (Instantsimages.ch)

HGH: Marie-Noëlle Pasquier, dans quel état d’esprit êtesvous à quelques jours de l’ouverture de la 25e édition?

Marie-Noëlle Pasquier: Impatiente! Comme chaque année, il y a bien sûr la tension des derniers préparatifs, mais aussi l’excitation de voir aboutir près d’une année de travail. Les exposants fidèles reviennent, les invités d’honneur changent: c’est un équilibre qui rend chaque édition unique.

Vous avez rejoint Espace Gruyère il y a plus de vingtcinq ans. Qu’est-ce qui a été l’élément déclencheur pour imaginer puis lancer le Salon?

L’idée est née dans une région profondément ancrée dans le terroir. Ici l’élevage, les produits laitiers et le fromage font partie du décor. Nous voulions créer un événement grand public qui valorise cette richesse. Même si chez nous les enfants savent d’où vient le lait, on s’est dit qu’il fallait peut-être le rappeler à ceux des villes. En parallèle naissaient les AOP-IGP et l’association Terroir Fribourg. Ces échanges ont donné envie d’aller plus loin. Espace Gruyère s’est associé à la Fédération patronale et économique de Bulle, déjà proche des métiers de bouche.

Gardez-vous un souvenir précis de la première édition?

A l’époque, le Salon se tenait au printemps, ce qui n’était pas très judicieux; à cette saison, on pense plus au maillot de bain qu’à la fondue (rires). Je me souviens surtout de la chaleur accablante: les apprentis boulangers-pâtissiers exposaient leurs créations en chocolat sur la mezzanine; tout fondait!

Quelle était alors la perception du public vis-à-vis des produits du terroir?

Le public n’était pas encore suffisamment sensibilisé aux produits locaux. Le Salon a servi de vitrine à des producteurs qui n’avaient pas forcément d’espace pour se faire connaître, contribuant à valoriser les circuits courts. Le public, ensuite, a beaucoup évolué. Autrefois, certains stands de dégustation ressemblaient à des bars gratuits; aujourd’hui, les visiteurs viennent vraiment pour découvrir, comprendre, choisir. Ils veulent apprendre et déguster en connaissance de cause.

Quelles ont été les grandes étapes de l’essor du Salon?

Le tournant majeur a été le changement de date. Passer de mai à fin octobre-début novembre a tout changé. Les artisans et les exposants y ont tout de suite trouvé leur compte. Ce déplacement du calendrier, vers 2006, a marqué le début d’une croissance régulière.

Cette année, quelque 300 artisans présenteront 5000 produits. Vous attendiez-vous, il y a 25 ans, à un tel succès?

Nous avions de l’ambition, mais pas l’idée qu’un jour le Salon deviendrait un rendez-vous si apprécié par les exposants et le public.

Comment avez-vous géré le défi logistique lié à ce succès?

Nous avons dû apprendre à répartir la fréquentation. Au début, le mercredi était calme et le samedi surchargé. Nous avons introduit des tarifs avantageux et des animations en semaine pour lisser la présence du public. Aujourd’hui, la répartition est plus équilibrée: le vendredi, par exemple, attire beaucoup de visiteurs genevois, vaudois ou valaisans. De manière générale, nous encourageons également les visiteurs à venir avec les transports publics.

Quid de l’édition 2025?

Les invités d’honneur sont le Liechtenstein, ChasseSuisse et le Vacherin Fribourgeois AOP. Citons aussi notre programme pour les familles. L’entrée est gratuite jusqu’à 15 ans et nous proposons le grand espace L’Amuse-Bouche avec des ateliers didactiques et ludiques en libre accès. Il y a aussi l’Ecole du Goût, avec des activités de 45 minutes animées par des artisans, pour les enfants de 6 à 12 ans. Et pour la première fois, une chasse au trésor en partenariat avec une douzaine de producteurs.


«Le tournant majeur a été le changement de date du Salon»


En un quart de siècle, les habitudes alimentaires ont changé. Qu’est-ce qui, selon vous, a le plus évolué?

Le rapport à la consommation locale. Pendant la pandémie, beaucoup ont découvert les artisans du coin et vu que leurs produits étaient meilleurs et pas forcément plus chers. Certains ont gardé ces réflexes, d’autres sont retournés vers les grandes surfaces. C’est pourquoi il faut continuer à informer et à faire goûter. Et je crois qu’il faudrait aussi travailler au niveau scolaire, soit enseigner l’alimentation et le goût dès l’enfance, car les enfants d’aujourd’hui sont les consommateurs de demain.

Que souhaitez-vous pour l’avenir du Salon et la valorisation du terroir?

Je souhaite encore de belles éditions à cette formidable manifestation. J’aimerais surtout un soutien politique clair pour encourager la production locale et la promotion de nos produits, afin de préserver le savoir-faire helvétique.

(Propos recueillis par Patrick Claudet)


Davantage d’informations:

gouts-et-terroirs.ch/fr