Paolo Basso sort son premier cru cousu main

Le meilleur sommelier du monde 2013 lance son premier pur merlot tiré du terroir où il réside, le Mendrisiotto. Pour lui, il s’agit d’une véritable reconversion professionnelle, au service du commerce et même de la production de vin.

Enrico Trapletti (à g.), a mis à disposition et travaille en bio suisse un parchet de merlot pour son ami Paolo Basso. (dr)

Officiellement, le vin sera présenté le ­30 octobre à Zurich. Sur l’étiquette, il affiche Samhàin qui se prononce «sao-oui-ne» en gaélique. Et ça n’est pas par hasard! Le sommelier de haut vol est né le 31 octobre (1966). Ce jour-là est aussi le nouvel an des Celtes, la fête des moissons de ceux qui avaient colonisé une bonne partie de l’Europe, à l’âge du bronze, près d’un millénaire avant notre ère. Ils s’étaient installés aussi au nord de l’Italie, à Besenate, où est né Paolo Basso, qui possède aussi la nationalité suisse. Et si les Grecs et les Romains transportaient les liquides, vin compris, en amphores, les Celtes, eux, connaissaient le tonneau en bois.

Déjà l’équivalent d’un petit producteur

Samhàin marquait la fin de l’été et le début de l’hiver. Le passage entre deux périodes, comme le vit Paolo Basso. En dix ans, il a beaucoup voyagé de par le monde. Il conseille depuis près de dix ans la compagnie Air France, un mandat qui prendra fin l’an prochain. Et la Covid 19 a modifié les échanges en présentiel... et le sommelier se recentre, aujourd’hui. Installé à Ligornetto, avec son épouse Hélène, il est impliqué dans la production et la distribution de vins. Il choisit lui-même les crus, notamment italiens, qu’il distribue.

Depuis dix ans, il produit avec ses amis tessinois, viticulteurs et œnologues, des bouteilles. Il propose déjà deux blancs et deux rouges de deux niveaux et un rosé, qui font référence à la fille du couple, Chiara. Cette activité représente l’équivalent d’un petit producteur, soit 25 000 bouteilles de vins tessinois par an. Paolo Basso n’avait pas encore de «grand vin», même si son Rosso di Chiara est un assemblage de 80 % de merlot et 10 % de chacun deux cabernets, le franc et le sauvignon, qui connaît un beau succès: tiré à 5000 bouteilles, il a obtenu deux fois les tre bicchieri du guide italien Gambero Rosso. Dès le millésime 2019, proposé à la vente par unité (80 francs) ou par trois bouteilles, Samhàin comble cette lacune dans le haut de la gamme.

Un style bourguignon

Un de ses amis, Enrico Trapletti, réputé pour ses propres merlots, lui a confié une parcelle, à Coldrerio, dans le Mendrisiotto, où il reste les plus anciens vestiges du néolithique du Tessin. C’est de ces mille kilos de merlot, cultivé en bio bourgeon, en reconversion dès 2019, puis labellisé dès 2022, qu’il tire son «grand vin». Si, pour ses autres vins, il collabore avec Alfred De Martin, l’œnologue de la maison Gialdi, il a tenu, pour Samhàin, à s’impliquer de A à Z. Récoltés, en 2019, à belle maturité, soit à 103 degrés Oechslé, les raisins ont été placés au frigo, avant d’être vinifiés en cuve inox. La fermentation malolactique s’est terminée en barrique. Le sommelier a choisi avec soin le contenant: des fûts de 300 litres, d’un tonnelier, Saury, connu pour ne pas «marquer» les jus. Le vin est resté 24 mois dans quatre fûts, au contenu assemblé en cuve, avant mise en bouteille, cet été.

Les millésimes suivants sont déjà en cave, pour assurer la continuité à ce cru, appelé à représenter «le style Paolo Basso». A quoi ressemble-t-il? «Au nez, il est fin, délicat, élégant. Je lui trouve même un peu de cuir... En bouche, il a de l’énergie. Davantage que sa structure, c’est sa longue persistance qui marque. C’est un bourgogne tessinois», résume son auteur.

(Pierre Thomas)


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